Poteries : quand la terre se raconte

Les potiers et les poteries sont riches d’histoires. Savais-tu par eXemple que les potiers de Soufflenheim ont donné leur surnom auX habitants du village ? Les « Hellegeister » – les fantômes de l’enfer – car les fours à bois dégageaient autrefois une brume constante et les flammes sortaient des cheminées. S’intéresser à l’histoire des couleurs et des motifs, c’est comprendre l’évolution du métier. J’avais donc envie d’en savoir un peu plus sur l’histoire de ces poteries et sur leurs motifs. Je te partage ici mes découvertes.

Betschdorf VS Soufflenheim

Avant de s’intéresser à la poterie, un petit éclaircissement semble nécessaire. A Soufflenheim on produit de la terre cuite (poreuse) et de la faïence, c’est-à-dire une terre cuite émaillée pour être étanche. Ces produits sont principalement utiliser pour la cuisine, contrairement à Betschdorf où l’on produit du grès. Le grès est simplement plus résistant et étanche, car la cuisson de la terre est plus élevée. Ce qui en fait un produit idéal pour la conservation des aliments et des services de table. Tu reconnait le grès de Betschdorf par sa couleur grise aux motifs bleu, par une cuisson au sel. Klar ?

Les bases

Avant d’aller faire tes achats à Soufflenheim, il y a quelques fondamentauX à connaître.

  1. Toutes les poteries en vente dans les boutiques sont produites à Soufflenheim. N’hésite pas à demander auX potiers de jeter un coup d’oeil à l’atelier. Si c’est demandé gentiment, ils t’ouvriront leur porte 🙂
  2. Petits points, fleurs, coeurs, … : tous les décors sont réalisés à la main. Les décoratrices utilisent principalement une poire, dont l’ancêtre est le barolet (une poire en terre, surmontée d’une plume d’oie) pour décorer les poteries. Une cuisson de 12h à plus de 1000°, permet de révéler les couleurs.
  3. La glaisière de Soufflenheim (dans la forêt de Haguenau) est encore en eXploitation pour en eXtraire la terre glaise (ou argile). Celle-ci est gratuite (hors charges d’eXtraction). 
  4. Toutes les poteries sont utilisables au micro-ondes, au four traditionnel ou à bois, même au BBQ et passent au lave-vaisselle.
  5. Une seule adresse propose du grès à Soufflenheim : la poterie Graessel.

Les couleurs

Les premières poteries étaient neutres, c’est-à-dire marrons et sans couleurs. Logique ! Elles n’avaient comme seule fonction de servir d’ustensile de cuisine. Avec le temps, notamment avec le développement du tourisme, les premières couleurs apparaissent et la poterie devient lentement un objet de décoration en plus de servir à cuisiner : c’est l’histoire de la terrine qui décor la dernière étagère de ta cuisine 😉

Les premières couleurs à apparaître sont le bleu foncé, le « fauX-bois », le crème et le « bleu-vert ». Ces couleurs étaient des engobes, c’est-à-dire des terres de couleurs diluées qui permettaient de dessiner sur les créations. Aujourd’hui les engobes sont encore largement utilisées pour colorer les poteries. 

les premières couleurs : « bleu-vert », bleu et « faux-bois »

L’arrivée des autres couleurs, les émauX, se fait plus récemment, notamment suite à l’utilisation d’une argile blanche/grise par certaines adresses, ce qui permet de varier la palette de couleurs. Les récentes recherches début 2000 ont permis de trouver des émauX sans plomb, comme le rouge, donc en phase avec le contact alimentaire, et qui résistent à la chaleur. 

Histoires de motifs, comme des hiéroglyphes alsaciens ?

De nombreuX potiers eXpliquent comme raison principale de la décoration des terres par l’arrivée des femmes dans l’industrie de la poterie. Ce sont d’ailleurs encore les femmes qui sont aujourd’hui principalement à la décoration des créations.

L’un des tout premiers motifs était le « moucheté ». C’est, de mémoire de potier, très probablement le décor le plus ancien. Les potiers utilisaient un ustensile en branchage, comme un petit fagot, et projetaient de la couleur. Aujourd’hui, seules 2 adresses te proposent encore un motif moucheté. 

motif moucheté

Les petits points sont originaires d’Europe de l’Est. En regardant de plus prêt, on se rend compte que le motif des points remonte le Danube. L’Alsace ayant une histoire commune avec l’Allemagne, voilà que les potiers s’adaptent à la demande, très demandeuse de ce motif.

Les pois sont vintage. On les retrouve dans les années 70 sur les mugs en fer blanc. Souviens-toi le mug rouge à pois blancs. Voilà encore un motif pour suivre la mode. 

Points et pois

Et la marguerite ? A l’époque de nombreuses fleurs étaient dessinées, comme par exemple la marguerite, le coquelicot et le chardon (le trio de fleurs bleu, blanc, rouge), ou l’épi de blé. Il se raconte que chaque famille avait jadis sa fleur sur son service. En ramenant la terrine de baeckeoffe chez le boulanger pour la faire cuire dans son four, la fleur servait de signe de reconnaissance. La marguerite a lentement écartée les autres et est devenue le symbole d’un village et orne fièrement un bon nombre de créations.

Petite histoire croustillante : certains (toi peut-être) ont encore l’habitude de sceller le couvercle du baeckeoffe avec de la pâte à pain. Si l’apport sur le plan gustatif n’est pas prouvé, l’origine de cette technique vient aussi du boulanger ! En déposant son plat pour le chauffer au four, la famille scellait le couvercle pour éviter qu’on lui pique la viande. Tout simplement 🙂

Et puis en étirant lentement les points… on pourrait créer une marguerite ? 

Enfin le coeur, qui arrive plus récemment, à peine avant 2010. Comme un rappel des coeurs découpés dans les volets et dans les chaises traditionnelles ? Peut-être. Mais pour répondre à une demande forte, certainement ! C’est devenu un incontournable, prêt à effeuiller la marguerite ?

De nos jours

En plus de ces traditionnels motifs, les potiers ne cessent de se réinventer er de proposer de nouveaux décors. Ils jonglent avec les couleurs et proposent des chats, des poules, des bretzels, des marguerites revisitées et des calaveras. Certains ré-interprètent même les classiques en s’inspirant du kelsch ou en disséminant des points dans les décors. Il est même possible de personnaliser certaines créations ! Alors n’hésite pas à demander 😉

Voilà pour ce petit bout d’histoire des motifs des poteries de Soufflenheim, qui te donnera peut-être envie de regarder ton prochain moule à Kougelhopf de plus prêt 😉

> Envie de savoir pourquoi je cuisine à la poterie ? Rdv par ici 🙂

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Une réponse à “Poteries : quand la terre se raconte”

  1. […] Je souhaite remercier l’ensemble des personnes rencontrées lors de ce « tour des potiers ». J’ai énormément appris sur le travail d’un potier en 2021 et surtout sur la qualité des plats en cuisine. Une utilisation malheureusement oubliée par une génération (avec l’arrivée du plastique) mais qui est de plus en plus dans la mouvance du consommer mieuX. Ce nouvel art de cuisiner je le mets maintenant en oeuvre et t’eXplique ici pourquoi. N’hésite pas à me suivre sur Facebook ou Instagram, les recettes vont arriver 😉 Enfin, les motifs et les couleurs ont euX aussi une histoire et si ça t’intéresse, j’ai noté toutes mes trouvailles juste là. […]

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